Page 16 - Journal Culturel de Metz - 2022-09
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L'idée novatrice et la création par étape du Familistère :                     Maquette d'implantation de l'usine Godin et du Familistère, ou Palais social,
                                                                                                   édifié à Guise(Aisne) par l'industriel Jean-Baptiste André GODIN, pour loger ses ouvriers
    Godin est avant tout un réformateur social, à la fois penseur et pragmatique, qui cherche
                                                                                                     et leurs familles, dans un cadre socialement digne, un modèle de révolution pacifique.
       à concevoir et à mettre en place des moyens concrets de lutte contre le paupérisme.
 La misère, l’exploitation des ouvriers de son époque, l’iniquité du système de répartition des
richesses, le délabrement moral qui résulte du "libéralisme sauvage" sont autant d’éléments dont

     il prend conscience lors de son Tour de France de Compagnon, voyage qui transforme
complètement sa vision du monde et sa manière de penser. Doué d’une capacité inventive rare,

      il s’installe à son compte et fait fortune en développant un nouveau type d’appareils
  de chauffage, les fameux poêles en fonte qui feront la renommée de son nom. S’appuyant sur

   ses nouveaux moyens financiers, il décide de mettre en application ses propres principes,
  en commençant par éradiquer toute misère ouvrière dans sa sphère d’influence, c’est-à-dire
 auprès de ses salariés et de leurs familles. De la même manière qu’il a analysé de nombreuses

  pensées socialistes avant de déterminer la sienne, il a étudié de près différentes expériences
                         d’habitat ouvrier, afin de s’en inspirer ou de les rejeter.

   Les Corons du Nord et la Cité ouvrière de Mulhouse (1853) retiennent tout particulièrement

son attention. Mais ces deux expériences seraient aux yeux de Godin, sans aucun intérêt si elles
n’avaient été accompagnées par la création d’institutions d’utilité commune, assurant hygiène

               et salubrité, ainsi que la possibilité d’une scolarisation pour les enfants.
 Il s’agit pour Godin de concevoir un habitat confortable, aéré, lumineux, où il fait bon vivre :

    l’architecture en elle-même doit améliorer le niveau de vie. En dehors des bâtiments il fait
      réaliser un jardin d’agrément, espace de loisir et de promenade à l’air libre. Il place
        la Famille au centre de son œuvre, afin de permettre aux valeurs et aux sentiments
              qui naissent naturellement d’une cellule familiale soudée de s’épanouir :

                                le Familistère remplace donc le Phalanstère.

L’intérieur des appartements est sous l’entière responsabilité des locataires, et la malpropreté
  du logis peut être une raison suffisante pour l’expulsion des habitants. De plus, les habitants

  jouissent de ce qui apparaît comme un luxe certain en disposant, à chaque étage, de bornes-

fontaines et de cabinets de toilettes ; une amélioration fondamentale pour l'hygiène et la santé.

Familistère de Guise : pavillon central - architecture  Le théâtre du familistère.                       La buanderie-piscine (50 m² / 2,50 m avec plancher mobile.

Autres installations : Les magasins d’approvisionnement et les services d’alimentation du Palais social permettent la suppression d'intermédiaires inutiles. Une buanderie-piscine : un lavoir
   servant d’une part à la lessive, mais fournissant également tout le confort nécessaire à l’hygiène personnelle, avec des douches, notamment pour les ouvriers au sortir du travail, ainsi

qu’une piscine offrant à tous un confort pour le moins rare, en ce milieu du XIXe siècle, avec adaptation des niveaux d'eau pour les enfants ou les adultes. Après l’achèvement, en 1865,

du pavillon central, Godin décide de construire en face de celui-ci, un théâtre et des écoles. Cet ensemble définit, avec la nourricerie-pouponnat située au Nord du pavillon central, un axe

privilégié de la composition du Familistère. De plus, une société musicale est créée en 1859, pour animer toutes les fêtes du Familistère, un premier kiosque en bois est bâti en 1860 au
 milieu du parc aménagé à l’Ouest du Palais social. Ce kiosque est reconstruit en bois vers 1900, puis en 1918, avec les destructions de la Grande Guerre, en maçonnerie et charpente

                                                        métallique (classé M.H. en 1991 - voir le TàD).

Kiosque à musique de 1918                               Jardin et serres du jardin d'agrément.           Calorifère Godin 123 (1898)  Mausolée Godin à Guise.

                 "Petit Godin" - caractéristiques : en fonte de fer émaillée et tôle de fer / H. 95 - L. 50 - P. 50 cm / "GODIN 123" moulé sur l’écusson fixé sur l’appareil.
    Les "calorifères hygiéniques à combustion complète et à feu visible" bénéficient d’une disposition brevetée qui leur confère une excellente étanchéité et leur permet de brûler
complètement les gaz de combustion du charbon, selon le principe d’un poêle à double combustion. Le célébrissime "Petit Godin" appartient à cette catégorie d’appareils développée
  dans les années 1890. Il fait son entrée au catalogue de la manufacture en 1898. La tête, le socle et la porte de l’appareil sont en fonte de fer émaillée. L’enveloppe du foyer est en
   tôle de fer. L’intérieur est garni de briques réfractaires. Il est toujours fabriqué à Guise. / Calorifère hygiénique à combustion complète n°123 (Collection Familistère de Guise).

Le Mausolée "Godin" du familistère : la tombe de Godin se trouve à l’extrémité du jardin d’agrément, sur un promontoire qui domine le paysage. Il se compose d’un obélisque en pierre d’une

 quinzaine de mètres de hauteur, orné de deux allégories assises en bronze. À gauche : le Travail avec un homme puissant, torse nu, portant un tablier à la taille. Son bras droit tient une louche
de mouleur identique à celles utilisées par les fondeurs de l’usine. On voit aussi à l’arrière un châssis de moulage, ainsi que les attributs traditionnels de la métallurgie et du travail : une enclume,
 une pince et un marteau. L’ouvrier tourne le regard vers le buste de Godin. A droite : une mère et son nourrisson symbolisent la Famille. Un berceau est visible derrière eux. De la main droite,

  la femme montre à son enfant le fondateur du Familistère. Au-dessus du buste de Godin, la face principale de l’obélisque est ornée par une troisième figure en haut relief. Une femme tenant
  un flambeau à la main écarte le voile (ou le linceul) dont elle est enveloppée. Légère, elle semble emportée vers le haut. Il s’agit d’une allégorie de la renaissance de l’âme ou de l’esprit après

     la mort du corps. Godin croyait en effet à l’existence de l’esprit indépendamment de son enveloppe corporelle. Autres faces de l’obélisque sont gravés les titres des principaux ouvrages

du réformateur et quelques citations de ce dernier. Enfin, sur la façade postérieure du monument, un buste de Marie Morte a été ajouté après que sa dépouille ait été inhumée en 1908 auprès
                                de celle de Godin. (Restauration en 2017, par l'architecte Charlotte Hubert - inscrit à l’Inventaire supplémentaire des M.H. depuis 1991.

                                      Le Familistère, devenu "Musée de site" (https://www.familistere.com/fr)

                           Portraits de Jean-Baptiste André Godin (1817-1888) et de son épouse Marie Moret (1840-1908),
           Le Palais social est un ensemble à vocation culturelle, touristique et sociale qu’on visite avec plaisir et qui ne laisse pas indifférent :
5 000 m² d’expositions et plusieurs hectares de jardins. Il reste "actif" grâce au programme Utopia. Ouvert sur la ville, il est encore habité dans l’aile
 droite et des appartements sont à louer. Il a ses usagers quotidiens, des écoliers dans ses écoles, des promeneurs dans ses jardins, des spectateurs
  dans son théâtre. Un projet hôtelier est en cours. Le parcours de visite conduit de l’appartement du fondateur au théâtre à l’italienne, des économats

                                                  au pavillon central, de la buanderie-piscine aux jardins du Palais social.

              Le Familistère de Guise ouvert au public de 10 h 00 à 12 h 30 et de 13 h 30 à 18 h 00. - Les économats sont ouverts en non-stop
                           (billeterie, boutique, salle d'exposition). - des visites guidées, sont proposées à 11h30 et 15 h 30 chaque jour.
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