Page 11 - Le Baudet mai 2024
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"Le Baudet" Bulletin mensuel du Club Philatélique Ardennais                                 mai 2024         N° 495
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                Journal Le ballon poste n°3 du 10 Novembre 1870 transporté par le ballon La Ville d’Or-
                léans. Au verso cachet à date d’arrivée 13 décembre 1870. Courrier non accidenté (atterris-
                sage en Norvège). Ce pli a été authentifié par notre expert Alain Jacquart dans le cadre des
                ventes Aristophil (vente Aguttes du 5 avril 2019, lot 1318)

                Les aéronautes marchèrent à l’aventure pendant trois heures, par soixante centimètres de
                neige ; ils désespéraient quand enfin ils découvrirent une cabane où ils passèrent la nuit. Vers
                les six heures du matin, après s’être frottés avec de la neige et avoir rempli leurs poches
                d’herbes sèches pour en mâcher afin de tromper les ardeurs de la faim, ils se remirent en
                route au hasard, incapables de deviner l’endroit où ils étaient tombés !
                Aucune trace d’êtres humains ne se relevait ; leurs forces s’épuisaient et ils envisageaient le

                moment où ils seraient obligés de s’arrêter et de mourir épuisés, dans la neige, sans avoir pu
                remplir la mission qu’ils s’étaient imposée. Rolier n’avait que cette pensée… Tout à coup ils
                remarquèrent les traces d’un traîneau et les pas d’un cheval ; ils suivirent péniblement ces
                traces jusqu’à la fin de la journée, pour arriver à une autre cabane dans laquelle ils trouvèrent
                les restes d’un feu, du café et des pommes de terre cuites ! qu’ils dévorèrent, on suppose
                avec quelle avidité…
                Un bruit les fit sortir de la cabane : deux hommes s’avançaient tenant un cheval par la bride.
                Rolier les salua à la russe ; ils répondirent à cette marque de politesse, mais il fut impossible

                aux uns comme aux autres de se faire comprendre. Les voyageurs avaient beau répéter
                : France ! ballon ! Paris ! les paysans les regardaient d’un air ahuri. Les aéronautes firent
                une mimique connue, indiquant qu’ils avaient faim. Les braves gens allumèrent le feu, tirè-
                rent de leur bissac du lard fumé avec et des pommes de terre. Les naufragés de l’air étaient
                sauvés !
                Mais où se trouvaient-ils ? Rolier saisit la boîte d’allumettes d’un des paysans et lut « Niti-

                dals taends likkor. Il sund, Christiania ». Ainsi ils étaient en Norvège. Rolier fit comprendre
                qu’il désirait se rendre dans cette capitale : ils en étaient à 300 kilomètres. (…) Les paysans
                comprirent ce qu’il désirait ; ils guidèrent les voyageurs et après deux heures de marche pé-
                nible, ils arrivèrent dans un petit hameau où demeuraient leurs sauveteurs et leur famille.
                C’est de là qu’ils partirent pour se rendre à Christiania.
                Leur odyssée ne tarda pas à être connue et leur voyage à travers cette partie de la Norvège fut
                triomphal. A Kongsberg, ils trouvèrent le télégraphe et purent envoyer une dépêche au con-

                sul de France à Christiania. Ils furent l’objet d’une ovation étonnante. Les dames de la ville
                avaient acheté tout ce qu’elles avaient pu trouver d’étoffe blanche, rouge et bleue, aussi,
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